Hébergement d'urgence : "nous sommes hors-la-loi"
Une cinquantaine de personnes se sont réunies ce lundi à l’initiative du Collectif des Acteurs et professionnels de l’Urgence Sociale et de l’Hébergement (CAPUSH 35) face à la Préfecture. Ils protestaient contre l’insuffisance du dispositif d’hébergement d’urgence prévu par l’Etat.
"Mortelles". Avec l'arrivée du froid, le collectif CAPUSH 35 n'a plus le temps de mâcher ses mots pour décrire les conditions des personnes à la rue. A son initiative, une cinquantaine de personnes se sont réunies ce lundi devant la préfecture d'Ille-et-Vilaine pour exprimer leurs craintes concernant la situation des sans-abris. Dès jeudi, le lancement du plan hivernal devrait augmenter les capacités d'hébergement d'urgence dans le département : au 171 places pérennes s'ajouteront, jusqu'en mars, 68 places provisoires. Pas assez pour le CAPUSH 35 et pour l'association droit au logement (DAL).
Une "urgence totale"
Le DAL35 mentionne une "urgence totale" et fait part de sa "très grande inquiétude" face à la pénurie de logements et d'hébergements d'urgence. Les personnes sans logement évoquent une difficulté chronique pour obtenir leur mise à l’abri. Appeler tous les jours le 115 pour ne pas dormir dehors est devenu le quotidien pour certains, comme Nassih, 63 ans et sans-abri. "Ca fait deux mois que je vais à droite à gauche. Trois jours ici, trois jours là. J’ai laissé mes affaires partout. C’est ça, ou je dors dehors".
D'autant qu'une fois trouvé, l’hébergement n’est souvent que provisoire. A défaut de disponibilités, les travailleurs sociaux se voient contraints d’effectuer une rotation des hébergements. Malgré ce que prescrit la loi – un droit à la mise à l’abri en attente d’une structure adaptée – la durée d’hébergement ne peut excéder quelques jours. Steve, travailleur social et membre du CAPUSH déplore : "Nous sommes hors-la-loi en disant aux gens qu’ils ne peuvent plus rester au bout de quelques jours. Mais nous ne pouvons pas faire autrement." Le phénomène est accentué par l'explosion de la demande en Ille-et-Vilaine : en un an, les appels au 115 ont augmenté de plus de 34%.
Regonfler les budgets
Le DAL continue de soutenir les propositions de réquisition de logements vacants pour répondre à l'urgence. Pour CAPUSH, cependant, les besoins sont plus larges. En cause, les dotations de l’Etat qui diminuent chaque année. "Avec 35% de réduction des budgets c’est toute l’aide sociale qui est touchée. Il faut se donner les moyens d’assurer un réel accompagnement pour ces personnes démunies, pour qui la mise à disposition d’un logement n’est pas nécessairement la première urgence", estime Steve, membre du collectif.
Le plan hivernal se résume à un "pansement sur une jambe de bois" pour le CAPUSH. Pour résoudre la situation de manière durable, estime le collectif, la mise en place d’une politique forte soutenant l’aide sociale serait indispensable. "L’Etat ne doit pas se déresponsabiliser", argue le CAPUSH 35. Mécontents des "effets d'annonce" et attendant un "vrai changement", le collectif estime que les 50 millions d'euros débloqués pour l'hébergement d'urgence par la ministre du Logement, Cécile Duflot, ne produiraient pas d'effets sensibles. "Les dotations iront principalement en région parisienne. L'Ille-et-Vilaine ne récupérerait que 550 000 euros dont une grosse partie servirait à l'évacuation du squat de Pacé...".
Auteur : Sarah Mansoura
, Le Mensuel de Rennes, Article original ici.
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