Relecture de COORUS par le Dal35
Un peu d’histoire :
Lors de l’évacuation de l’ancien funérarium, la mairie de Rennes avait mis 60 logements à disposition pour reloger les Demandeurs d’Asile, logements attribués par l’AFTAM. Cette prise en charge par l’AFTAM impliquait à l’époque l’accompagnement social des DA en SHT (Service d’Habitat Temporaire), avec l’embauche de deux travailleurs sociaux en CDD à mi-temps, spécialement dédiés à ces personnes. Le préfet avait lors promis 80 places de CADA (Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile), 20 places avant Noël 2010 et 60 au 31 mars 2011 ; A ce jour 48 des personnes relogées sont toujours en attente de place en CADA. Ces personnes n’ont plus le soutien de travailleurs sociaux pour leurs démarches, notamment près de l’OFPRA.
Les logements :
La ville de Rennes n’a jamais caché que les logements occupés par les DA seraient réhabilités pour en faire des logements sociaux de régime général, alors que ces logements devaient être pérennisés dans leur affectation aux DA. On assiste ici à un tour de passe-passe où ces places « pérennes » disparaitraient et seraient remplacées par ces « nouveaux » logements. Donc aucun logement supplémentaire n’est créé par la ville de Rennes. Sauf, hasard des lieux, boulevard de Guines où nous attend sous peu une expulsion demandée en justice par la mairie de Rennes !
Les communes :
Il s’agirait de Betton, Bruz, Le Rheu, Noyal Châtillon, Rennes et Thorigné Fouillard. Les communes hors de Rennes fourniraient donc 15 logements (Il y aurait, suivant l’INSEE, 8 000 logements vides dans Rennes Métropole).
On se pose là plusieurs questions : Pourquoi si peu de communes ? (Rappelons que Rennes Métropole compte 37 communes). Pourquoi pas de proposition de communes aussi grandes ou riches que Cesson, Saint Jacques de la Lande ou Vezin ? Il semblerait que des communes sollicitées ne souhaiteraient pas supporter la charge d’une mission de l’Etat, surtout sans garantie de paiement et ne voudraient pas épouser la « querelle » Etat/ Ville de Rennes.
Les partenaires et les missions :
C’est une véritable usine à gaz, aux chances de fonctionner assez aléatoires.
La SEA (Sauvegarde de l’Enfance à l’Adulte) :
Contactés par nos soins, des syndiqués de l’association nous ont affirmé avoir appris le projet par le communiqué de presse de leur bureau mettant d’ailleurs en doute la viabilité économique du projet. Ces mêmes syndiqués s’interrogent sur la compétence de la SEA en matière de droit des étrangers et de la qualité du suivi de familles qui déménageront tous les 15 jours). Ils s’interrogent aussi sur la nécessité d’embaucher un salarié, sous quel statut et avec quel salaire ?
L’AFTAM :
L’AFTAM est actuellement complètement débordée et en sous effectif ; les travailleurs sociaux embauchés après l’évacuation du funérarium ont terminé leur CDD. Selon une de ses cadres, les crédits de l’année concernant l’hébergement (à l’hôtel, autre scandale !) seraient épuisés ; c’est parfois dans le hall du foyer Guy Houist que sont accueillies les familles de DA pour la nuit.
L’AFTAM doit « établir les listes des personnes prioritaires ». Il est fort à craindre que les célibataires et certaines ethnies soient encore une fois omis, comme c’est déjà le cas actuellement (voir le relogement sélectif après l’évacuation du 280 rue de Fougères). L’AFTAM est entièrement cornaquée par la préfecture.
Le 115 :
Le 115 ainsi que l’AFTAM sont des associations missionnées par l’Etat. Le 115, dispositif d’urgence pour sans-abri, est départemental et le nombre des hébergements qu’il propose est notoirement insuffisant, en été comme en hiver. C’est le 115 qui organise l’alternance de nuits en lieux d’hébergement et de séjours à la rue des sans-abris. Concerné humainement, le personnel du 115 craque régulièrement devant l’impossibilité d’héberger tel ou tel cas encore plus dramatique que l’autre. A noter (Rapport sur le fonctionnement du dispositif d’hébergement d’urgence 2009) que devant l’afflux des demandes, 58% des appels sont rejetés pour encombrement de la ligne.
A ceci s’ajoute le risque d’une dilution départementale des familles (hébergement par exemple pour 3 nuits avec un seul billet Aller-retour payé, interdisant la scolarisation des enfants et les RDV à Rennes (La vie d’un Demandeur d’Asile n’est faite que de RDV : Préfecture, Croix Rouge, médecin, associations de distribution alimentaire, de vestiaires.)
Le logement « revolving » que ce soit pour 3 ou 15 jours répond à la doctrine de « non incrustation » des personnes : On organise ainsi la précarisation, l’angoisse d’un logement et plus généralement l’insécurité ainsi que l’errance diurne dans les rues avec enfants et baluchons.
Nous ne souhaitons en aucun cas discriminer les Demandeurs d’Asile) des SDF (Ce serait reprendre les mots du préfet) mais ils dépendent de dispositifs légaux différents, et même si le traitement des demandes est le même, il est strictement sous dimensionné.
Le dispositif 115 était initialement prévu pour des célibataires d’où le peu d’accueil de familles. et paradoxalement, les hébergements s’adaptant à des normes familiales, les célibataires sont petit à petit exclus, parce « qu’ils se débrouillent mieux seuls dans la rue. » L’association « Les Morts de la Rue » peut témoigner de la fréquence des pathologies et décès dus au séjour dans la rue. Ajoutons que l’accueil et le suivi social prévus par la loi sont absolument inexistants ; il faut dire que les hôtels ont rarement un travailleur social parmi leur personnel.
En signant ce protocole, les communes sont délestées de tout contrôle sur les habitants des logements qu’elles proposent.
Les associations caritatives :
Le protocole indique dans « les engagements des contributeurs » que les prestations sont à confirmer : en clair, il n’y a rien de fait. Les associations Emmaüs, Fondation Abbé Pierre et FNARS étaient déjà impliquées lors du dispositif Postel. Sont-elles prêtes à recommencer ?
C’est comme si on établissait un budget d’investissement avec un gros point d’interrogation pour les recettes. Ou alors on revient aux appartements de la ville de Rennes, déjà équipés par Emmaüs lors de l’évacuation du funérarium.
Conclusions provisoires :
Un projet aussi bâclé dans n’importe quelle association entrainerait illico le licenciement du rédacteur.
L’usine à gaz comprend déjà 2 instances de travail : le comité de pilotage, la commission d’évaluation et la préfecture s’invente le « comité de suivi » dans ses contributions.
Pourquoi usine à gaz : parce qu’il me semble impossible de faire fonctionner SEA, AFTAM et 115 ensemble, tant les tâches envisagées sont énormes et sous financées (transport des travailleurs sociaux par exemple). De plus chacun dépend d’une institution à la culture et aux savoir-faire biens ancrés et aux prérogatives bien délimitées (Etat, communes)
Il s’agit d’une opération publicitaire ou politique ne garantissant
rien et au pire recyclant le projet déjà défini à Noël, avec quelques logements supplémentaires dans les communes de la Métropole et boulevard de Guines à Rennes.
Le résultat de tout ce fatras serait le clonage du 115, créant le problème de l’organisation d’un 115 bis avec des durées de séjour différentes.
Nous affirmons que les rotations imposées par le 115 ne gèrent que l’indigence du dispositif d’accueil d’urgence ; il est tout simplement impossible de vivre dans ces conditions.
De plus et comme d’habitude, les célibataires seront encore isolés et laissés livrés à eux-mêmes.
Les problèmes de RDV seront encore plus difficiles à gérer ainsi que la scolarité des enfants et les problèmes médicaux.
Enfin on s’interroge sur la politique de la mairie de Rennes qui finançant aux deux tiers un projet d’accueil des migrants ne peut que reproduire le déplorable système d’accueil existant. Elle n’a pas su se hausser à la hauteur de ses discours en proposant un accueil digne aux migrants ; plus pour quelques euros, elle abandonne la maîtrise du projet à la préfecture et ses tentacules. Reste à voir ce qu’il adviendra des sans-papier qui seraient aussi logés dans les déclarations du plan COORUS et les affirmations de la mairie.
Voici avec un peu de parti pris ce que nous inspire le plan COORUS.
Nos revendications sont donc :
Un logement décent pour toutes et tous,
L’application de la loi par la préfecture et au-delà par l’Etat,
Une prise de position claire de tous les élus et élues contre les expulsions sans relogement
L’utilisation de la loi de réquisition
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